Je ne porte pas le pagne du 08 mars… #educationIntentionnelle6

Chaque année, le 8 mars, le monde célèbre la Journée internationale des droits des femmes. Une journée dédiée à la lutte pour l’égalité et la justice, où l’on commémore les victoires obtenues par les femmes et où l’on réfléchit aux défis qui persistent. Au Cameroun et dans d’autres pays d’Afrique, une tradition vestimentaire s’est installée : le port d’un pagne spécialement conçu pour l’occasion.

Le pagne du 08 mars: Un privilège pour certaines, une pression pour d’autres 

Le pagne du 8 mars est généralement offert aux femmes qui ont une aisance ou une stabilité financière, que ce soit par leurs entreprises, leurs époux ou compagnons, ou encore par leur entourage et leurs réseaux. Pour les femmes financièrement à l’aise, c’est un cadeau symbolique.

Mais pour celles qui ont des moyens limités, c’est une source de stress. Les femmes aux revenus modestes doivent souvent cotiser pour se l’offrir ou faire face à des tensions dans leur foyer si leur compagnon ne peut ou ne veut pas le leur offrir.

Les hommes qui ne peuvent pas se permettre d’acheter ce pagne sont parfois jugés ou critiqués, alors que leurs priorités financières peuvent être ailleurs (santé, éducation, logement). Ce pagne, censé symboliser l’unité, devient ainsi un marqueur de classe sociale et une source de division.

SMIG Cameroun= 43 969 FCFA, Cout de célébération (5 000 pour l’achat d’un démi pagne+ 5 000 de couture + 5000 sortie, nutrition et boisson)

 Un business lucratif, pas une cause sociale 

Le pagne du 8 mars coûte au minimum trois fois plus cher qu’un pagne ordinaire (3 500 FCFA). Pire encore, il change de design chaque année, obligeant les femmes à en acheter un nouveau si elles veulent suivre la tendance. Cette pratique commerciale transforme une célébration des droits des femmes en une opportunité de profit.

Qui bénéficie réellement de cette manne financière ? Les fabricants de tissus, les couturiers et les commerçants, mais certainement pas les femmes qui luttent quotidiennement pour leurs droits. Si encore, c’était une entreprise ou une coopérative de femmes artisanes camerounaises qui produisait le fameux tissu, j’essaierais de comprendre.

Le coût total pour célébrer le 8 mars (achat du pagne, frais de couture, etc.) peut représenter le tiers du SMIC (Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti) dans certains pays ; et qui au Cameroun s’élève à environ 43 969 FCFA. À qui est donc destiné ce pagne ? Clairement pas aux femmes qui vivent avec un salaire de base ou qui doivent subvenir aux besoins de leur famille avec des ressources limitées.

Pourquoi ne pas adopter un design unique pour au moins cinq ans ? Quel est ce symbole qui doit faire peau neuve chaque année ? Je pense fortement qu’un véritable symbole de lutte et de solidarité devrait être « quasi » intemporel, pas soumis aux caprices de la mode et du marketing.

 L’argent de la fête : un gaspillage de ressources 

Les célébrations du 8 mars impliquent souvent des dépenses qui, avec un autre regard, peuvent paraître extravagantes. Je prends comme exemple le cas d’une entreprise comptant 50 femmes : location de salles d’hôtel (par exemple, 500 000 à 1 000 000 FCFA), frais de restauration (5 000 FCFA x 50), et surtout encore coûts du pagne et de la tenue (12 000 + 5 000 FCFA) x 50. Soit un total minimum de 1 600 000 FCFA et 2 100 000 FCFA. Imaginez tout ce que cet argent pourrait accomplir :

 

  • Acquérir une couveuse néonatale pour des centres de santé maternelle et infantile. Des innovateurs camerounais ont d’ailleurs conçu une couveuse néonatale intelligente qui coûte moins de 2 000 000 FCFA.
  • Équiper deux (02) salles multimédias d’une capacité de 10 postes chacune dans des écoles modestes. Ce qui permettrait de favoriser l’alphabétisation numérique de 500 à 1 000 élèves par an: Soit près de 5 000 élèves avant l’amortissement desdits équipements.
  • Offrir 42 bourses universitaires (pour les universités publiques) ou une centaine de bourses pour des jeunes filles issues de milieux modestes.
  • etc.

 

La satisfaction d’avoir mené une action pérenne et transformative n’a-t-elle pas une bien meilleure saveur qu’une gorgée de bière ou qu’un pagne éphémère ? 

 

Et pourtant à l’origine c’était un outil d’expression collective

Certes je porte une critique sur le coût et l’impact économique, je reconnais toutefois que le pagne du 08 mars reste pour certaines femmes un symbole fort d’appartenance et de célébration de leurs luttes. Pour beaucoup, le porter est un moyen de revendiquer leur place dans la société et d’affirmer leur engagement en faveur des droits des femmes. En effet, à l’origine, cette tradition visait à renforcer la solidarité féminine et à offrir un espace d’expression collective. On le constate tous, au fil des années, elle semble avoir pris une tournure plus commerciale, s’éloignant de son essence première.

Et si on imaginait un modèle où le pagne serait produit par des coopératives de femmes locales, générant ainsi un impact économique direct pour celles qui en ont le plus besoin ?

Pour moi, le 8 mars, c’est tous les jours : intentionnalité

L’un de mot preféré est le mot: #intetionnalité. Le 8 mars ne se limite pas à une journée symbolique pour moi. C’est une philosophie, une quête pour les droits que je vis au quotidien à travers CAYSTI et ses initiatives comme ClubTech and TechWomenFactory fondé sur le droit d’accés à l’éducation et aux opportunités. 

 

  • ClubTech est un espace où les jeunes, en particulier les filles, sont formés aux compétences technologiques et de leadership. Toute femme a d’abord été une jeune fille. Nous sommes donc très intentionnel quant à un impact long terme en éduquant les jeunes (filles et garçon) sur les questions d’équité, d’inclusion dans cadre ludique d’apprentissage et d’innovation et d’autonomisation. 
  • TechWomenFactory est une initiative qui vise faciliter l’accès équitable aux compétences, aux emplois décents et financement pour les femmes dans les métiers du numérique. Nous avons créé plus de 200 emplois et récemment aider les startups à lever 150 000 CAD. Des bourses de formation sont d’ailleurs ouvertes ce mois de mars via le lien ci-contre.

 

L’impact de ces initiatives est, je pense, plus significatif que le port d’un pagne. Elles transforment des vies, ouvrent des portes et créent des opportunités durables.

 

Le 8 mars : une question d’égalité et de justice 

Le 8 mars est une journée qui nous rappele l’importance de lutter pour l’égalité des chances, la justice sociale et l’autonomisation des femmes. Malheureusement, je regrette que nos célébrations au Cameroun le pagne du 8 mars, avec son coût élevé et sa philosophie autour éloigne aux véritables enjeux de justice et même d’équite entre les femmes. 

Ceci me rappelle une loi que nous avions vu en Chimie en classe de 2nde : La loi de Markov Nikov qui dit que lors d’une réaction d’addition, l’atome d’hydrogène se fixe préférentiellement sur le carbone le plus hydrogéné. En d’autres termes, les riches deviennent plus riches, et les pauvres restent pauvres.  Ainsi, au lieu de promouvoir l’égalité, ce pagne renforce les inégalités existantes. 

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Cited twice by Forbes Afrique among the young leaders transforming the continent, ambassador NASA Space Apps, Next Einstein Forum and TechGirls, member of the African Union AI Advisory Group.

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